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#KeepIton: Lettre Jointe pour garder l’internet libre et sécurisé pendant les élections présidentielles dans la République de Burundi

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Le 18 mai, 2020

#KeepIton: Lettre Jointe pour garder l’internet libre et sécurisé pendant les élections présidentielles dans la République de Burundi.

Re: Accès à Internet garantira une participation et une transparence accrues aux élections présidentielles du Burundi

Votre Excellence Pierre Nkurunziza, Président de la République de Burundi

CC: 

Général de Brigade IRAMBONA Télesphore, Director General, Agence de Régulation et de Contrôle des Télécommunications (ARCT); Nestor Bankumukunzi, Président du Conseil National de Communications, Burundi;

Nous, les organisations soussignées, qui constituent la coalition #KeepItOn, un réseau mondial qui réunit plus de 210 organisations de 75 pays qui cherchent à mettre fin aux coupures d’internet dans le monde, écrivons pour vous demander d’urgence que votre bureau assure la stabilité et l’ouverture de l’internet et des réseaux sociaux avant, pendant et après les élections présidentielles au Burundi prévues le 20 mai 2020. Nous vous appelons, monsieur le Président Nkurunziza, à faire en sorte que l’internet et tous les autres canaux de communication soient ouverts, sécurisés et accessibles tout au long de la période électorale en République du Burundi.

En effet, l’accès à internet et aux plateformes de réseaux sociaux peut contribuer de manière significative à augmenter le taux de participation des citoyens à des événements nationaux importants tels que les élections, et par conséquent, ils peuvent utiliser l’internet pour tenir leurs dirigeants élus responsables. Il est donc important de garantir un internet ouvert, sécurisé et fiable.

Nous avons reçu des informations sur la diminution de l’espace civique dans le pays avec une augmentation des violations des droits de l’homme  qui ont contraint plusieurs journalistes, militants et politiciens de l’opposition à s’exiler par crainte de poursuites. Nous avons également été informés que certains sites Web de médias indépendants ont été bloqués dont Inzamba, Radio Publique Africaine (RPA) et Iwacu restent inaccessibles au Burundi, ce qui empêche les gens d’accéder aux informations et aux contenus générés sur les événements qui se déroule dans le pays. Nous sommes gravement préoccupés par l’absence d’un espace ouvert et actif de la société civile au Burundi, qui est un préambule fondamental pour le succès de toute démocratie. Nous utilisons ce moyen pour vous appeler à adopter d’urgence les mesures nécessaires pour garantir que la liberté d’expression et l’accès aux droits à l’information soient respectés et garantis au Burundi.

Les blocages d’internet nuisent aux droits humains, perturbent les services d’urgences et endommagent les économies

La recherche nous montre que les blocages d’internet et la violence surviennent souvent ensemble [1], [2]. Les blocages perturbent la libre circulation d’informations et 1 2 créent une couverture d’obscurité qui cache les abus de droits humains, hors de la vue de l’oeil public. En outre, les journalistes et les agents des médias ne peuvent pas contacter leurs sources, recueillir des informations, ou publier leurs reportages sur la campagne électorale sans outils de communications digitaux.[3] Justifiés pour de nombreuses 3 raisons, les blocages d’internet coupent l’accès à des informations vitales, e-commerce, et services d’urgences, plongeant toute la communauté dans la peur. 

Un Internet ouvert a favorisé la créativité, l’innovation et l’accès à l’information et à d’autres types d’opportunités sociales, économiques, culturelles et politiques sans précédent à travers le monde. Les moyens techniques utilisés pour bloquer l’accès aux informations en ligne compromettent souvent dangereusement la stabilité et la résilience d’Internet. De même, les interruptions de réseau déstabilisent la capacité à supporter la subsistance des petites entreprises et le développement économique. 

Les blocages d’internet sont en contravention avec lois nationales et internationales

Les blocages d’internet violent les droits humains fondamentaux comme la liberté d’expression, l’accès à l’information, et le droit de se réunir, qui sont garantis par les cadres nationaux, régionaux, et internationaux comme la Constitution de la République de Burundi, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH), et la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP). 

Le Comité des Droits de l’Homme de L’ONU, l’interpréteur officiel du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, souligne dans son Commentaire Général no. 34 que les restrictions sur le discours en ligne doivent être nécessaires et proportionnelles en achevant un objectif légitime[4]. Les blocages, en contraste, affectent 4 disproportionnellement tous les utilisateurs, et restreignent inutilement l’accès à toute information et aux communications avec les services d’urgence pendant des moments cruciaux. Les blocages ne sont ni nécessaires, ni effectifs, ni ne poursuivent de but légitime, parce qu’ils empêchent la libre circulation d’information, contribuent à la confusion et au désordre, et obstruent la sécurité publique. 

En tant que coalition, nous croyons en un internet qui habilite tous droits humains, et nous sommes convaincus que l’accès à l’internet et aux plateformes de médias sociaux peut favoriser un résultat transparent et équitable lors des élections présidentielles prévues le 20 mai, 2020 grâce à la participation active des citoyens. 

Nous vous invitons donc à prendre les mesures nécessaires pour garantir que les fournisseurs de services internet et les acteurs concernés garantissent un Internet ouvert, accessible et sécurisé à travers le Burundi tout au long de cette période critique. Les fermetures d’Internet également jettent une ombre sur les droits de l’homme contre les citoyens.

Nous vous demandons respectueusement d’utiliser les postes importants de vos bons offices pour:

  • Veiller à ce qu’Internet, y compris les réseaux sociaux et autres plateformes de communication numérique, reste accessible tout au long des élections;
  • Veiller à ce que l’organisme de réglementation des télécommunications au Burundi, l’Agence de régulation et de contrôle des télécommunications (ARCT) et le Conseil national de la communication s’abstiennent d’ordonner aux fournisseurs de services Internet (FAI) du pays de couper accès à Internet et d’informer les gens de toute forme de perturbation ou d’interférence dans la fourniture de l’accès à Internet; 
  • Ordonner le déblocage de tous les sites Web des médias indépendants qui sont actuellement inaccessibles dans le pays.

Nous nous ferons un plaisir de vous aider dans toutes ces questions.

Nous avons l’honneur, Monsieur le Président, de vous prier d’agréer l’expression de nos très haute considération.

Salutations distinguées,

Access Now

ADISI-CAMEROUN

Advocacy Initiative for Development (AID)

Africa Open Data and Internet Research Foundation (AODIRF)

AfroLeadership

ARTICLE 19 Eastern Africa

Bloggers of Zambia 

Campaign for Human Rights and Development International (CHRDI)

Collaboration on International ICT Policy for East and Southern Africa (CIPESA) 

Committee to Protect Journalists (CPJ)

Derechos Digitales

Gambia Press Union (GPU)

Human Rights Foundation

Human Rights Network for Journalists in Uganda (HRNJ-U)

Iraqi Network for Social Media – INSM

International Press Centre (IPC)

Internet sans frontières 

Jamii Forums, Tanzania

Media Foundation for West Africa

Media Institute for Southern Africa, Zimbabwe

Media Matters for Democracy (MMfD)

Media Rights Agenda (MRA) 

Namibia Media Trust

NetFreedom Pioneers (NFP)

OpenNet Africa

PanAfrican league of bloggers and cyberActivists – AfricTivistes

PEN America

Réseau des Journalistes Burundais pour la CPI, (RJB-CPI)

Right2Know Campaign, South Africa

Southeast Asia Freedom of Expression Network (SAFEnet) 

Unwanted Witness, Uganda

Usuarios Digitales 

Villes et Communes


1 An internet shutdown is defined as an intentional disruption of internet or electronic communications, rendering them inaccessible or effectively unusable, for a specific population or within a location, often to exert control over the flow of information. See more at Access Now.
2  Anita R. Gohdes, “Pulling the Plug: Network Disruptions and Violence in Civil Conflict,” Journal of Peace Research, January 31, 2014.
3 Darrell West, “Internet shutdowns cost countries $2.4 billion last year,” Brookings Institution, October 2016; Jonathan Rozen, “Journalists under duress: Internet shutdowns in Africa are stifling press freedom,” Africa Portal, August 17,  2017.
4 U.N. Human Rights Committee, “General Comment No. 34,” United Nations, July 2011.