Les citoyens dans le monde, particulièrement ceux dans les démocraties émergentes ou menacées, ne sont pas seulement inquiets des longues files d’attentes et autres frustrations qui accompagnent souvent les élections. Ils ont également besoin d’un plan de secours, au cas où leurs gouvernements décident de plonger intentionnellement le pays dans une obscurité digitale partielle ou totale.
Ceci est actuellement le cas pour les citoyens du Togo, qui se préparent à aller aux urnes samedi 22 février – les premières élections présidentielles après l’ajout de nouvelles limites en terme de mandat à la constitution suite aux grandes manifestations de 2017. L’administration actuelle avait procédé à des coupures d’internet au cours de ces manifestations il y a trois ans, et au cours des élections précédentes en 2015. Dans le cadre des préparatifs des élections de samedi, des rapports ont signalé que certains sites web et plateformes de réseaux sociaux étaient inaccessibles pendant quelques heures le 6 février 2020.
Aucune tentative du gouvernement de couper ou d’entraver l’internet au cours des élections ne saurait être tolérée.
Des élections libres, justes et participatives sont la pierre angulaire de toute société démocratique. Un internet ouvert, sécurisé et accessible permet aux citoyens de s’impliquer activement dans le processus électoral sans aucun obstacle. Lorsque les mesures adéquates sont mises en place, l’internet encourage les citoyens à participer à la campagne, à soutenir des candidats potentiels, à s’engager dans le débat national, à trouver leurs bureaux de vote, à voter, et à s’assurer de la transparence et l’équité des élections.
Le Togo devrait suivre la voie de ses voisins, le Ghana, le Nigéria et le Sénégal. Ces pays ont montré qu’un internet ouvert, protégé et accessible peut favoriser la participation civique lors du processus électoral et au-delà, la protection des résultats des élections et la promotion de la démocratie.
Lorsque des coupures d’internet surviennent au Togo, au Kazakhstan, en Inde, au Venezuela, au Malawi ou en Mauritanie, lors d’une manifestation, d’élections ou d’examens scolaires, elles portent la même signification : elles limitent le libre flux d’informations, elles censurent et bâillonnent toute dissidence, et elles ne protègent jamais les gens. Ce sont des outils de violations des droits humains et coûtent aux citoyens et aux gouvernements des millions de dollars chaque jour. En outre, les perturbations de réseaux placent les citoyens en proie au doute et aux pires inquiétudes, puisqu’ils sont coupés de leurs familles, leurs amis et leurs personnes proches, et sont dans l’incapacité de surveiller leurs alentours.
Il est donc de la responsabilité du gouvernement togolais de s’assurer que les citoyens et les résidents aient accès à un internet ouvert, sécurisé et fiable avant, pendant et après les élections.
Il n’est plus vraiment possible de dissocier les mondes hors ligne et en ligne depuis que l’internet et les plateformes de réseaux sociaux sont devenus partie intégrale des activités quotidiennes des citoyens. Ainsi, il en est de la responsabilité de tout gouvernement d’investir dans l’internet afin de permettre à ses citoyens de bénéficier des opportunités qu’il fournit plutôt que de le restreindre. Il est impératif que les gouvernements et autres parties prenantes capitalisent sur le pouvoir de l’internet et des plateformes de réseaux sociaux pour faire avancer la croissance et le développement, qui peuvent à long terme améliorer la vie des citoyens.
La campagne mondiale contre les coupures d’internet
Les organisations intergouvernementales telles que l’Union Africaine et les Nations Unies, entre autres, continuent à appeler les gouvernements à s’abstenir d’instrumentaliser les coupures d’internet, qui violent les droits humains et paralysent les économies. De même, la coalition #KeepItOn, représentant plus de 210 organisations de la société civile de 70 pays, s’est mobilisée pour faire campagne contre les coupures d’internet à l’échelle mondiale.
Au cours des années, notre surveillance et documentation des coupures d’internet dans des pays tels que la République Démocratique du Congo, le Bénin, le Cameroun et le Pakistan – où les gouvernements ont manipulé l’accès à internet et aux médias sociaux pendant les élections – a montré que les résultats des élections affectées par des coupures sont généralement entachées d’irrégularités. Afin de tenir des élections libres, équitables et pacifiques le 22 février 2020, le gouvernement togolais doit garder l’internet et toutes les plateformes de réseaux sociaux accessibles.
Nous exhortons donc le gouvernement togolais à explorer les opportunités qu’offre internet pour rendre les élections au Togo aussi libres et transparentes que possible.
Montez la garde et faites-nous part de votre histoire
Si vous êtes au Togo, il y a des étapes simples que vous pouvez suivre afin de vous préparer aux blocages potentiels avant les élections.
Si les plateformes de médias sociaux ou certains sites web sont déconnectés, vous pouvez y avoir accès de nouveau en utilisant un Réseau Privé Virtuel (VPN), qui vous permet d’accéder à internet comme si vous étiez à un autre emplacement. (Cela est également une manière utile d’améliorer votre sécurité personnelle, en particulier lorsque vous utilisez des réseaux wifi publics.)
Téléchargez ces services maintenant ainsi vous serez prêt en cas de blocages d’un certain type :
Note : les VPN ne sont efficaces que si vous pouvez encore accéder à internet avec suffisamment de bande passante pour avoir accès au service. Ils ne vous permettent pas de contourner une coupure totale d’internet.
Vous pouvez également aider la communauté mondiale dans la lutte contre les coupures d’internet à surveiller la situation au Togo, et à donner des alertes précoces d’une coupure en utilisant les outils de l’Open Observatory of Network Interference (OONI) pour tester votre connexion et partager les résultats. Voici comment le faire :
Au cours des élections à venir au Togo, nous vous encourageons à partager avec nous les informations sur toutes perturbations du réseau et la censure rencontrée en ligne. Votre témoignage et toute information que vous pourriez partager concernant une coupure d’internet que vous avez vécu peuvent aider les efforts pour mettre fin à ces restrictions portant préjudice aux droits humains. Vous pouvez aider à informer les médias internationaux et fournir des preuves pour le plaidoyer mondial contre la censure et les coupures auprès de forums tels que le Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies.
Nous vous prions d’utiliser ce formulaire pour partager votre histoire de coupure. N’hésitez pas à nous contacter. Nous sommes toujours à l’écoute.